Le monde politique est en crise dans presque tous les vieux pays industrialisés. Les clivages qui structuraient les joutes électorales ne semblent plus aussi fermement installés qu’hier. Thibault Isabel fait le point sur la situation, en évoquant notamment l’importance des gilets jaunes dans les grandes recompositions à venir.
Michel Maffesoli, professeur émérite à la Sorbonne, membre de l’Institut Universitaire de France, nous donne son analyse du phénomène des “gilets jaunes” et des grandes mutations qui touchent la société française.
Contrairement à ce que disent de nombreux commentateurs, les « gilets jaunes » ne constituent pas un phénomène complètement inédit. Certes, la dégradation de certains de nos lieux et monuments les plus symboliques, les violences physiques, les blessures, les incendies sont des événements particuliers, d’une intensité importante. Mais, comme le notait déjà Durkheim, tout phénomène « d’effervescence » sociale sécrète des « à côté » incontrôlables.
Le « clapotis des causes secondes » ne doit pas nous empêcher de voir ce qui est essentiel : ainsi le fait d’entendre parler de « refus de la représentation », de « déni de la démocratie », d’un mouvement qu’on ne peut pas canaliser, etc. En bref, il s’agit d’un mouvement sans leader et sans revendication explicite ou en tout cas rationnelle ; et d’un mouvement comme les commentateurs le constatent avec dépit dans lequel « on ne peut plus distinguer les “vrais” gilets jaunes des casseurs ».