Interview de Thibault Isabel, le 2 janvier 2019, dans la revue en ligne L’Inactuelle

Le monde politique est en crise dans presque tous les vieux pays industrialisés. Les clivages qui structuraient les joutes électorales ne semblent plus aussi fermement installés qu’hier. Thibault Isabel fait le point sur la situation, en évoquant notamment l’importance des gilets jaunes dans les grandes recompositions à venir.


L’inactuelle : Entre les deux tours de la présidentielle de 2017, Macron assurait que l’élection opposait les « progressistes » aux « conservateurs », ce qui revenait à effacer le clivage droite-gauche antérieur. Marine Le Pen lui a donné raison, puisqu’elle espérait rallier des voix mélenchonistes : elle disait que les nouveaux clivages opposeraient les « mondialistes » aux « patriotes ». Dans les deux camps, on voulait donc faire voler en éclat les vieux schémas politiques. Se dirige-t-on du même coup vers la disparition du clivage droite-gauche ?

Thibault Isabel : Le clivage droite-gauche n’est plus réellement pertinent aujourd’hui. La raison en est simple : la gauche comme la droite dites de gouvernements souscrivent depuis longtemps, à peu de choses près, à la même idéologie, celle de la mondialisation économique. Les seules différences résiduelles entre la gauche et la droite reposent sur des broutilles : le nombre de fonctionnaires dont on veut délester la fonction publique, par exemple (puisque la gauche reste imprégnée d’un soupçon de social-démocratie et de foi en l’Etat providence).

La gauche et la droite libérales, que rien n’opposait vraiment sur le fond, ont cessé de jouer au jeu de la fausse alternance pour jeter les masques et s’allier face à leurs nouveaux adversaires, devenus trop dangereux.

L’effacement du clivage droite-gauche a été favorisé par la montée du climat protestataire, liée à la crise économique de 2008 et au sentiment général de déclassement qui touche l’Hexagone, sans parler de la crise des migrants ou des vagues successives de terrorisme. On a dès lors observé un rapide essor des partis populistes, non seulement en France, mais partout en Europe, et même aux Etats-Unis, avec Trump et Sanders. La gauche et la droite libérales, que rien n’opposait vraiment sur le fond, ont cessé de jouer au jeu de la fausse alternance pour jeter les masques et s’allier face à leurs nouveaux adversaires, devenus trop dangereux : en France, c’est Macron qui a servi de catalyseur. S’il n’y avait eu la montée des partis populistes, il est probable que tout le monde aurait perpétué l’ancien jeu de dupe, avec une fausse alternance entre la « gauche » et la « droite ».

Là où le clivage droite-gauche s’est maintenu, c’est au sein des partis dits d’extrême gauche ou d’extrême droite, c’est-à-dire au sein des partis populistes. Le clivage est toujours opérant autour du thème de l’immigration. Car, même quand les positions économiques sont proches, comme entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon lors des dernières présidentielles, aucun rapprochement n’est possible à cause du traitement des questions migratoires. Le clivage droite-gauche ne tient plus qu’à ça, pour l’essentiel. C’est pourquoi, même s’il conserve encore un fort pouvoir polémique, il ne signifie plus grand-chose intellectuellement, puisqu’il se réduit à un unique enjeu. Les conséquences électorales n’en demeurent pas moins considérables.

Une recomposition des clivages

L’inactuelle : Même si l’on voit les signes d’un relatif effacement du clivage droite-gauche dans le discours de nombreux politiciens, on assiste aussi dans l’arène culturelle à la radicalisation des vieux clivages. La Manif pour tous a montré que la droite culturelle restait plus combative que jamais, et l’engouement pour les théories du genre rappelle que la gauche culturelle n’a pas dit son dernier mot. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Thibault Isabel : J’ai personnellement toujours été sceptique à l’idée que l’élection de Macron favoriserait l’abolition du clivage droite-gauche en France. Le président de la République a même tout fait pour renforcer ce clivage aux extrêmes. Il ne faut pas confondre la logique intellectuelle et la logique électorale. Les anciens clivages évoluent intellectuellement, mais ils restent opératoires dans les urnes. Macron, en adoptant un positionnement « et de droite, et de gauche », a réussi à fédérer la gauche et la droite de gouvernement ; il a du même coup libéré de larges espaces à l’extrême gauche et à l’extrême droite. Il oblige donc ses opposants à durcir leur discours culturel pour s’opposer à lui et occuper les espaces laissés vacants. Macron crée deux blocs d’opposition en divergence assez radicale, et se maintient quant à lui en position centrale. Il empêche ainsi ses opposants de dégager des blocs suffisamment larges pour remporter des élections. Il clive ses adversaires, d’une manière qui me paraît très habile.

Les opposants de Macron sont majoritairement hostiles à la mondialisation libérale, à l’Europe maastrichtienne, et ils pourraient éventuellement s’entendre sur un programme commun visant à mieux protéger notre autonomie économique et politique. Mais la surenchère identitaire ou anti-identitaire pour s’opposer au macronisme favorise la montée d’une idéologie nationaliste et catholique à droite, et la montée d’une idéologie déconstructionniste et relativiste à gauche (par exemple autour des théories du genre).

Il est actuellement inconcevable d’envisager une alliance électorale entre populistes de gauche et de droite, parce que les points de désaccord culturels semblent insurmontables.

Il est actuellement inconcevable d’envisager une alliance électorale entre populistes de gauche et de droite, parce que les points de désaccord culturels semblent insurmontables. À l’inverse, le camp mondialiste n’a aucun mal à s’unir, parce que ses référents idéologiques sont beaucoup plus homogènes. Les politiciens LR et l’aile réformiste du PS se retrouvent autour de principes suffisamment proches pour se rassembler chaque fois que c’est nécessaire, au nom de ce qu’ils appellent le « front républicain ».

C’est un piège redoutable qui va empêcher durablement les opposants à la mondialisation d’accéder au pouvoir. Dans les conditions actuelles, je vois mal comment l’idéologie mondialiste pourrait perdre les prochains scrutins nationaux, malgré la cote de popularité dramatiquement basse du président et de son parti.

La recomposition des clivages

L’inactuelle : Les gilets jaunes sont-ils en mesure de bouleverser le clivage droite-gauche traditionnel ?

Thibault Isabel : Oui, sans doute, d’autant que le mouvement cherche réellement à se situer en marge des partis politiques classiques et qu’il entend à ce titre échapper aux extrêmes. Le mouvement des gilets jaunes pourrait jouer en France un rôle comparable à celui du M5S en Italie, dont on peut rappeler qu’il voulait initialement nouer des alliances avec des partis modérés plutôt qu’avec Salvini – je regrette d’ailleurs pour ma part que ça n’ait pas été possible. Mais le cas italien nous démontre également à quel point il est difficile de s’opposer au système en refusant jusqu’au bout l’extrémisme des idées. La fracture sociale a atteint un tel niveau que les débats sont hystérisés ; et c’est cette hystérie ambiante qui nous empêche d’élaborer des solutions raisonnables. En outre, les chasses aux sorcières permanentes contre la pensée « non conforme » poussent peu à peu toutes les dissidences vers les extrêmes, ce qui conforte le pouvoir en place. La dissidence prenant de ce fait un tour radical, elle est moins rassembleuse et se divise elle-même entre ses différents pôles de radicalité.

Il ne s’agit pas de tomber dans le confusionnisme. Les clivages politiques sont nécessaires, et il n’y aurait même tout simplement pas de politique sans clivages. Aucun parti, quel qu’il soit, ne se situe jamais « au-dessus de la mêlée ». En revanche, les anciennes notions de « droite » et de « gauche » ne sont plus réellement adaptées aux enjeux actuels. On peut se sentir plus ou moins de gauche ou de droite ; mais cela traduit de nos jours un état d’âme esthétique plus qu’un jugement politologique. Nous avons besoin de redéfinir les clivages sur des bases différentes, plus pertinentes. Notre incapacité à sortir des vieux paradigmes explique pour une part l’immobilisme du pays, que le mouvement des gilets jaunes a tenté d’ébranler. En restant enfermés dans les vielles lunes du XXe siècle, l’extrême droite et l’extrême gauche n’ont pas compris que nous avions changé de millénaire : leur discours parle d’un temps qui n’est plus le nôtre, et leurs solutions relèvent de la nostalgie plus que de la prospective lucide.

Une recomposition des clivages

L’inactuelle : Etes-vous favorable à la création d’un parti des gilets jaunes ?

Thibault Isabel :

Mon rôle est d’analyser les situations et d’exercer mon sens critique – à partir de mes engagements profonds, certes, mais sans m’enfermer dans un parti. L’esprit partisan est le contraire de la philosophie. J’aime qu’on s’engage, dans un esprit de débat ; je n’aime pas le militantisme, qui est toujours aveugle. Le mouvement des gilets jaunes, s’il prenait une forme politique dans le champ électoral, contribuerait à un émiettement du vote contestataire et offrirait une victoire durable aux partis de l’establishment, à moins de cristalliser toutes les voix dissidentes autour de lui, ce qui me paraît peu crédible. Il pourrait néanmoins créer un pôle alternatif dont nous avons grand besoin ; mais je ne suis pas certain du tout de sa viabilité.

Le principal défi des gilets jaunes sera surtout de se structurer idéologiquement. Pour l’heure, j’ignore tout à fait comment le mouvement évoluera. Le RIC n’est pas nécessairement une mauvaise idée, mais il peut recevoir des traductions très diverses : son utilité dépend de ses modalités concrètes d’application. Transformer la France en une démocratie référendaire établirait un face-à-face entre le peuple envisagé comme masse et le président-monarque du pays. Ce serait un retour dramatique à Louis-Napoléon, même si les référendums étaient laissés à l’initiative du peuple plutôt qu’à celle du prince. Au lieu de décentrer la vie citoyenne, on la concentrerait plus que jamais à l’échelle nationale.

Je trouve légitime qu’on prenne davantage en compte la souveraineté populaire ; mais il faut le faire par la base, d’une façon protéiforme, et non par le sommet, d’une façon unitaire.

Je trouve légitime qu’on prenne davantage en compte la souveraineté populaire ; mais il faut le faire par la base, d’une façon protéiforme, et non par le sommet, d’une façon unitaire. Lorsque la majorité citoyenne entend légiférer sur tout et n’importe quoi, pour imposer dogmatiquement ses vues à l’ensemble du pays, on entre dans le champ de la tyrannie – et la dictature des peuples n’est pas moins violente que celle des autocrates. La souveraineté populaire ne doit s’appliquer que dans le cadre d’un Etat subsidiaire et limiter le pouvoir à des domaines restreints d’intervention, qui n’entravent pas nos libertés privées et publiques. Peut-être une partie des gilets jaunes seront-ils porteurs de cette aspiration. Mais c’est encore loin d’être évident, tant eux-mêmes sont en réalité divisés. Dès qu’il s’agira de clarifier leur programme, les désaccords apparaîtront.

Prenons garde aussi à l’individualisme qui se cache sous le recours permanent au référendum. Un vote de ce genre est toujours individuel. Les corps intermédiaires (régions, corps professionnels, associations) permettent au contraire de ramener la démocratie directe à une échelle locale, où l’on est vraiment au contact des autres citoyens, et de ce fait en prise avec le bien commun. Je pense qu’il faut accorder plus de pouvoir aux corps intermédiaires, et moins aux chambres parlementaires nationales ou à l’exécutif, mais faire des corps intermédiaires d’authentiques lieux de démocratie. On ne doit pas se contenter d’élire des représentants puis les laisser travailler sans qu’ils rendent le moindre compte à leurs électeurs. Les citoyens doivent plutôt négocier des politiques au sein de chaque corps intermédiaire, gratifié d’une autonomie et d’une marge de manœuvre plus importantes ; et ils doivent ensuite désigner des délégués qui porteront leur parole à l’échelle de l’Etat, lorsque c’est nécessaire. Cela implique de pouvoir révoquer à tout moment les délégués mandatés.

Plus qu’à la multiplication des référendums nationaux – néanmoins souhaitable pour les enjeux qui concernent l’ensemble de la communauté française, c’est-à-dire assez peu de choses selon moi –, je crois à la relocalisation de la politique et de l’économie, couplée à la lutte contre la mondialisation sous toutes ses formes. Les votations doivent d’abord être communales, régionales. Voilà l’unique moyen de réhabiliter le peuple citoyen dans sa diversité territoriale et culturelle.

Une recomposition des clivages

L’inactuelle : Emmanuel Macron assume sa politique libérale. Mais l’opposition au macronisme peut-elle se focaliser sur une critique de l’économie mondialisée, sans aborder d’autres problématiques, comme l’identité ?

Thibault Isabel :

Le sociétal a trop longtemps pris l’ascendant dans les marges contestataires du paysage politique. L’extrême gauche parle encore d’économie, mais elle se mobilise massivement autour des théories du genre, de l’homophobie, de la défense des sans-papiers, etc. On constate le même phénomène à droite, sous une forme inversée, où l’on se soucie davantage d’identité nationale, de laïcité et de remise en cause du mariage pour tous que de critique de la mondialisation. C’est cette prévalence du sociétal sur l’économique et le politique qui radicalise le clivage droite-gauche parmi les opposants au système. Tandis que les partisans du système sont unis, ses opposants restent désunis.

Il devient donc urgent d’échapper à l’hégémonie du sociétal. Nous pouvons avoir des positions tranchées sur les questions de société, à titre personnel ; mais nous devons avoir aussi le sens des priorités. Toute démocratie est faite de compromis. Or, des accords peuvent être trouvés autour de la critique de la mondialisation. La focalisation autour des questions sociétales est un appât tendu par les partisans du système pour diviser les forces contestataires. Je propose pour ma part une grande fermeté dans la résistance à la mondialisation néolibérale, y compris sous un angle écologiste – à travers la remise en cause de la croissance –, et une extrême modération autour des questions de société. A mes yeux, c’est même une exigence philosophique et morale, en plus d’être une exigence stratégique.

L’inactuelle : Que pensez-vous du protectionnisme économique ? Est-ce que le fait de rétablir des taxes à l’importation de certains produits permettrait à la France de retrouver une part de sa souveraineté économique ?

Thibault Isabel :

Le protectionnisme économique constitue le seul moyen de relocaliser notre économie et de sortir au moins partiellement de la mondialisation. C’est autour de mesures protectionnistes que devrait se reconstituer l’opposition au macronisme. Ces mesures protectionnistes sont peu ou prou plébiscitées par la totalité des opposants à Macron. Elles sont majoritaires dans l’opinion française. Mais il ne faut pas se contenter de mesures protectionnistes à l’échelle de la France. Il faut aussi des mesures protectionnistes à l’échelle de l’Europe, et même à l’échelle des régions, pour mieux lutter contre les puissances économiques étrangères, mais aussi pour relocaliser vraiment l’économie et enrayer la dynamique globaliste du grand capital, qui fait le jeu des multinationales. Le protectionnisme ne doit pas non plus s’abîmer dans la promotion des égoïsmes nationaux ; idéalement, il traduit plutôt un souci de régulation des échanges, et donc un souci de justice.

Une recomposition des clivages

L’inactuelle : La nation française, seule, est-elle en mesure de retrouver sa souveraineté, ou a-t-elle besoin des autres pays d’Europe ?

Thibault Isabel : La nation française est trop petite et trop isolée pour pouvoir résister à la mondialisation. Je condamne bien sûr l’Europe de Bruxelles telle qu’elle existe actuellement, mais je pense que nous ne pourrons pas nous passer de l’Europe, à plus long terme, pour nous protéger des grands flux de marchandise internationaux. La remise en cause légitime de l’Europe maastrichtienne, qui pourrait même justifier un retrait provisoire de l’Union européenne, doit s’accompagner de l’élaboration d’une autre Europe, qui respecterait l’autonomie de ses membres tout en leur apportant un cadre protecteur.

Je défends d’un côté l’autonomie des régions, pour que les citoyens puissent animer la vie politique d’une manière directe, avec une vraie démocratie locale ; mais je défends en même temps l’idée d’une Europe-fédérale, d’une Europe-puissance, qui s’érigerait en rempart contre les Etats-Unis, la Chine et les grandes multinationales. Nous devons rebâtir l’Europe sur des bases différentes. Si nous ne le faisons pas, nous serons laminés. La tâche est loin d’être simple, mais les soubresauts politiques un peu partout en Europe pourraient bouleverser la donne. Les nations du vieux continent sont la proie de mouvements populaires vivaces, parfois insurrectionnels, presque toujours hostiles à la technocratie bruxelloise. Pour autant, ces mêmes mouvements se rendront compte avec le temps qu’on ne peut se passer de l’Europe. D’une autre Europe. L’union continentale alternative que j’appelle de mes vœux est aujourd’hui une parfaite utopie, incontestablement. Demain, elle deviendra une évidence.

Retrouvez l’intégralité de cet interview publié sur le site L’Inactuelle le 2 janvier 2019 (cliquez ici)

5 commentaires

Thierry

Très bel article qui explique clairement les forces du système en présence.
Le système aussi fort soit il peut exploser à un moment (monarchie, république).
Oui à une Europe fédérale à terme mais ce n’est pas une revendication aujourd’hui des citoyens.
Il y a autant à faire pour réformer l’Europe que la France.

Renaud Vignes

Une nouvelle revue qui publie des articles toujours intéressant.

Uguen bernard

Bonjour ,
ça veut dire quoi, retrait provisoire de l’Europe ? Même si j’ai bien compris que ce « retrait » devrait s’ « accompagner de l’élaboration d’une autre Europe », mais par qui ? .
Donc vous êtes pour menacer ou pour sortir de cette Europe maastrichienne, ?

    Renaud Vignes

    Je ne répondrai pas à la place de l’auteur de cet article publié dans la revue L’inactuelle. Je vous donnerai la vision de CitizenLab. Nous sommes pour l’Europe simplement parce que nous savons compter. Ni plus ni moins. Et c’est bien triste car cela veut dire que le grand projet européen n’existe plus et que nous avons simplement conscience que ce serait plus dur en dehors de l’Europe. Ceci étant, ce qui nous semble important c’est de constater que face aux forces centrifuges qui sont à l’œuvre (mondialisation, européanisation, métropolisation), il est fondamental de se mobiliser pour une politique articulant proximité et mobilisation citoyenne. Notre avenir se situe dans cette complémentarité entre forces centrifuges (on ne changera pas le monde) et centripètes (c’est là que se situe notre niveau d’action). Dans ce contexte, une Europe qui bâtirait des digues pour ralentir les forces centrifuges aurait tout notre soutien.

Thibault Isabel

Pour répondre à la question, oui, je pense qu’il faut être prêt à quitter l’UE maastrichtienne pour élaborer un projet européen alternatif à plus long terme avec un éventuel noyau de pays européens « rebelles » au statu quo. Je ne demande pas personnellement le retrait immédiat de l’UE, je préfère une politique de menace. Mais, bien que je sois profondément européiste, il me semble qu’on ne peut pas se satisfaire de l’UE, qui fait en tout cas le contraire de ce que je lui demande: elle se mêle sans cesse de ce qui ne la regarde pas et refuse de faire ce qui la concerne vraiment. Au lieu d’aider le continent à gagner son indépendance, elle nous inféode aux grandes logiques internationales; au lieu de favoriser l’autonomie locale, elle contredit sans cesse le principe de subsidiarité. Mais le problème est double: il y a d’abord le fait que l’Europe ne joue pas son rôle selon moi, et il y aussi le fait que les territoires locaux ne soient plus des lieux de démocratie vivants. Donc, oui, je crois moi aussi qu’il faut articuler forces centrifuges et centripètes. C’est le fond du problème: une bonne Europe devrait servir à ça. Toute la question est de savoir comment y arriver…

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